La piété musulmane attache une grande importance à la récitation, sans le secours du texte (tilâwa), et à la lecture cursive (qirâ’a) du Coran. L’une et l’autre doivent être parfaites puisqu’il s’agit de paroles divines, dont il convient de respecter autant le fond que la forme. Pour parvenir à ce but, le récitant ou le lecteur doit articuler à la perfection les consonnes arabes, donner à chaque voyelle sa juste valeur, observer, à propos de chaque syllabe, de chaque mot, de chaque proposition dans le corps du verset qui est en prose rimée (saj’) -, les règles d’allongement, de brièveté, de quiescence, d’emphase, d’inclinaison, d’adoucissement de la voix, de contraction, de durée de pause et de reprise qui ne sont pas laissées au hasard ou au goût de chacun. Elles font au contraire l’objet de toute une discipline connue sous le nom de tajwîd (parfaite diction du Coran), en connexion avec la grammaire et la phonétique arabes.

En tant que tel, le tajwîd doit réaliser une prononciation parfaite des voyelles et des consonnes, tenir compte des sons en fonction de leur emploi, se référer, en conséquence, aux données classiques de la langue arabe et en particulier à ce que Zamakhshari (mort en 538/1143) appelle mushtarak, ou phénomènes consonantiques (prévocaliques, communs aux noms, aux verbes et aux particules (prépositions, adverbes, etc) il a donc pour objet la formation de la voix, les règles qui régissent son émission, en donnant à chaque voyelle, à chaque consonne, à chaque diphtongue, sa pleine valeur, tant au point de vue de la pureté et du tirribre qu’au point de vue de la hauteur et de la durée. Donc, à défaut de toute graphie conventionnelle, c’est sur la structure des versets et sur les lois de la phonétique que la bonne diction s’appuie.

Le tajwîd a ses méthodes. Il a aussi ses spécialistes. Le récitateur qualifié du Coran doit non seulement savoir le texte par cœur (qâri’), mais connaître à fond les règles du tajwîd. A ce titre, il porte nom de muqri’.