HALAL OU CACHER, JUIFS ET MUSULMANS INSISTENT SUR L’ABATAGE RITUEL À L’ASSEMBLÉE NATIONALE

Suite à des vidéos diffusées dans les médias sur les conditions scandaleuses d’abattage des animaux de boucherie en France, une commission d’enquête parlementaire a été lancée, en avril 2016, en vue d’avoir une « vue d’ensemble» de ce qui se passe dans les abattoirs, « un monde clos qui reste caché, secret».

Les représentants des institutions juives et musulmanes étaient auditionnés jeudi 16 juin 2016 au matin par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les abattoirs. L’occasion d’échanger sur les procédés souvent méconnus de l’abattage rituel.
La commission d’enquête a auditionné Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris et président d’honneur du Conseil français du culte musulman, Kamel Kabtane, recteur de la Grande mosquée de Lyon, Haïm Korsia, grand rabbin de France, et Bruno Fiszon, grand rabbin de Metz et de la Moselle, conseiller du grand rabbin de France et du président du consistoire central, membre de l’académie vétérinaire de France.

Cette audition a permis aux députés d’approfondir le thème de l’abattage rituel qui avait été abordé durant les auditions précédentes.
Un rapport sera publié en septembre 2016 contenant des propositions visant à « garantir le respect des règles élémentaires d’hygiène, de sécurité alimentaire et du respect de l’animal ».
La commission d’enquête s’est penchée dernièrement sur la question de l’abattage rituel (halal et casher), autorisé de manière dérogatoire en France, qui représente 15 % de la viande disponible, dont 1.6 % pour la viande casher, selon les chiffres donnés en commission d’enquête.

Le marché du halal en France, qui progresse de 10 % par an, pèse déjà 5,5 milliards d’euros. À l’échelle de la planète, le marché du halal est estimé à 450 milliards d’euros, soit près de 16 % de l’agroalimentaire mondial, indique-t-on.
Au cours de son audition, Sophie Nizard, chercheuse en sociologie et en anthropologie du judaïsme, a expliqué que « dire que l’abattage rituel est source de souffrances et que les autres ne le seraient pas me semble naïf et donc dangereux ».

Le Recteur de la Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a indiqué qu’il y a un consensus, au sein de la communauté musulmane, qu’il ne faut utiliser d’électronarcose « ni en pré- ni en post-jugulation».
L’électronarcose, un procédé utilisé dans les abattoirs, provoque l’étourdissement des animaux grâce un courant électrique avant qu’ils ne soient tués, une technique refusée par les représentants des communautés musulmanes et juives qui demandent que l’animal soit conscient au moment où il est égorgé.

Pour sa part, le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, les musulmans « sont aussi sensibles au bien-être animal et depuis des siècles », réfutant la stigmatisation de l’abattage rituel. « Est-ce que parce que nous sommes musulmans ou juifs nous sommes des barbares, s’est-il emporté ? Comme nos concitoyens, les musulmans sont aussi sensibles au bien-être animal […] C’est parce que je suis Français et musulman que je suis heureux de venir débattre de ces interrogations. […] L’abattage rituel est devenu aujourd’hui, pour certains, un argument de stigmatisation. »
Il a expliqué en outre que si l’étourdissement venait à être appliqué sur le halal, la viande proviendrait d’autres pays, comme c’est déjà le cas en Suisse.

Pour la religion juive, les rabbins, présents jeudi à l’Assemblée, ont indiqué qu’ils n’étaient pas favorables à l’étourdissement d’une bête pour le casher.
Pour Bruno Fiszon, grand rabbin de Metz et de la Moselle, dire que l’abattage rituel n’est que souffrance pour l’animal « peut s’avérer faux». Cite l’exemple de l’abattage de volailles, il a expliqué dans l’abattage rituel, la volaille est saignée, donc tuée, avant d’être accrochée à la chaîne, alors que dans l’abattage conventionnel, la bête est accrochée « consciente» à la chaîne, tête en bas, avant d’être plongée dans un bain où « le courant n’est pas réparti de manière uniforme».
Le grand rabbin de France Haim Korsia a conclu que « si on ne pouvait pas produire de la viande casher en France nous serions obligés d’aller la chercher ailleurs ».

Aussi, pour la viande halal ou cacher, les juifs et les musulmans de France ont insisté sur l’abattage rituel des bêtes, refusant leur étourdissement préalable, à coup de décharge électrique, utilisé dans les abattoirs français.